Expérience de la jupe….

Vendredi 28 septembre 2017

Dans notre établissement, nous avons eu une surprise qui a déstabilisé l’ensemble des encadrants et des élèves. Effectivement, deux lycéens, donc deux garçons, ont vécu la journée dans l’établissement en robe ou en jupe. Pourquoi ?

Non pas par pure provocation, mais pour s’engager, même de façon éphémère. Les élèves ont voulu faire une expérience sur les préjugés et lutter contre. Auparavant en classe, ils ont travaillé avec leur professeur d’Histoire Géographie (Mme Sieffert) sur le thème de l’engagement et du militantisme. Ils ont étudié les témoignages de Simone Veil et d’associations anti-homophobes qui ont permis de mettre en place des lois. Suite à cela, ils ont discuté des discriminations et de la façon dont on est imprégné de préjugés. Ils en sont arrivés à comprendre que nos valeurs reposent sur celles des hommes et non celles des femmes. Eprouver des sentiments est signe de faiblesse. Prenons pour exemple un ouragan, il porte majoritairement un prénom féminin (Irma, Maria, bon il y a eu José…). En bref, la plupart de tout ce qui est hors du pouvoir et de l’intelligence relève du domaine féminin et ces domaines sont généralement considérés comme inférieurs ou dérangeants.

Les garçons ont donc joué le jeu, ils sont venus dans l’établissement dans des vêtements de femme. Seuls les élèves et Mme Jung le savaient.

Pour rentrer dans l’établissement, ils ont rencontré des difficultés et pourtant dans la charte rien ne l’interdit. Dans ce cas, on ne touche pas les codes de bonne conduite de l’établissement mais les codes sociaux. Nos élèves ont eu des remarques. Des adultes ont demandé à ce qu’ils changent de tenue pour rentrer. Alors que les filles en pantalon peuvent rentrer librement ! Il faut savoir qu’en France depuis 2013, il n’est plus interdit de porter un pantalon pour une femme. Cette loi a été mise en place en 1800. Que dit cette loi ? «  Toute femme s’habillant en homme doit se présenter à la préfecture de police pour avoir l’autorisation ». Mais on remarque que le curseur de tolérance s’oriente vers les valeurs masculines. A ma connaissance, il n’existe pas de loi interdisant les hommes à porter des robes…. Cette loi de 1800 a été supprimée car elle s’oppose à nos principes fondamentaux issus de notre devise «  Liberté, Egalité, Fraternité ». Les hommes et les femmes doivent être considérés à égalité.

Pour revenir à nos élèves, Mme Jung les a laissé rentrer dans leur tenue.

Certains enfants de primaire ont bien dit à nos deux garçons en robe « qu’ils n’avaient pas le droit ». Même les enfants s’opposent à ce geste, ils sont déjà enclins à des préjugés.

Ils ont surtout déclenché des rires, mais aucune remarque homophobe. Cette dernière observation est intéressante car on n’ose pas de vive-voix utiliser des termes homophobes, il y a un respect ou une retenue, c’est-à-dire qu’on commence à accepter certaines différences.

Cette expérience a fait réagir beaucoup de personnes et nous avons pu réfléchir à la valeur de nos codes vestimentaires et ce qui les dirigeaient. Mais aussi de prendre conscience que tout n’est que point de vue. On a appris également qu’avec l’engagement, on peut changer certaines situations.

Ensuite, nous avons repris le cours avec les garçons qui se sentaient bien dans leur tenue et nous sommes repartis sur l’engagement de chacun. Cette classe travaille très bien à ce projet d’EMC. Bravo à eux, un grand merci à ces deux garçons et aussi à leurs parents par leur liberté d’esprit.

Pour finir, je reprendrai, et déformerai un peu, la citation de Françoise Lefèvre : « Rien n’est acquis, tout reste à faire ».                 Mme Sieffert

 

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